[...] Jacob suit une faille, l’isole sur la page, en
reprend le trait, l’épaissit, l’humecte du doigt, le caresse, l’estompe, l’idée d’un corps peut naître et il la laisse naître, il ne la cherche pas, il ne s’applique pas à déchiffrer une forme
secrète, elle naît, c’est tout, et sa fantaisie s’en empare, et puis sur une autre feuille, il laisse se composer des réseaux de ces lignes à la fois régulières et chaotiques, met de la couleur et
comme sa fantaisie ne se tarit pas vite, il laisse naître des visages étranges, nez anguleux, paupières lourdes, et des oiseaux, souvent des oiseaux, inutiles, insolents, invraisemblables, venus là
on ne sait comment ni pourquoi, Jacob en tout cas ne le sait pas, il regarde sa main faire avec ce qui est peut-être une tendresse naïve, peut-être aussi une provocation, une dérision [...
lire texte intégral]
Paul Andreu, architecte et écrivain, 2012